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Projet de loi cadre sur l’égalité femmes hommes : quels impacts pour les collectivités ?

marianne

Le 26 juin prochain, le projet de loi-cadre sur l’égalité entre les femmes et les hommes revient devant les députés en seconde lecture.

Si l’Assemblée nationale adopte sans modification le texte voté par le Sénat le 17 avril dernier, il sera définitif. Dans le cas contraire, le texte devra à nouveau être examiné par une commission paritaire mixte réunissant 7 membres de chaque assemblée.

Ce projet de loi est une première en France : il prend acte de la dimension systémique de l’égalité femmes-hommes.

Il embrasse l’égalité professionnelle, l’égalité dans la vie politique et sociale mais aussi l’égalité dans la sphère domestique et intime. Arrêtons- nous sur les articles qui concernent les collectivités locales ?

Une loi ambitieuse pour ancrer l’approche intégrée de l’égalité femmes-hommes dans l’action publique

L’article 1 du projet de loi engage avant tout l’action publique. L’Etat, les collectivités territoriales et les établissements publics devront adopter une approche intégrée de l’égalité femmes-hommes dans la conduite de leurs politiques. Les politiques publiques concernées sont :

  • la lutte contre les violences faites aux femmes,
  • la lutte contre les stéréotypes sexistes,
  • la maîtrise de la sexualité,
  • la lutte contre la précarité des femmes,
  • l’égalité professionnelle et salariale ainsi que mixité des métiers,
  • l’articulation des temps de vie et partage équilibré des responsabilités parentales,
  • l’égal accès des femmes et des hommes aux instances de décision,
  • l’égalité dans le champ culturel et artistique.

Un rapport annuel sur l’égalité femmes hommes pour les collectivités de plus de 50 000 habitants ?

Pour conduire des politiques publiques soucieuses de prendre en charge l’égalité entre les femmes et les hommes, un diagnostic préalable est indispensable. Si la loi est adoptée, les élu-e-s et les agent-e-s pourront se prévaloir de l’article 18 ter pour l’établir sur leur territoire. Le projet de loi prévoit que le maire, le Président d’EPCI, le Président du Conseil général et le Président du Conseil régional doit présenter avant le vote du budget un rapport sur la situation de l’égalité entre les femmes et hommes dans le fonctionnement interne de la commune mais aussi dans les politiques publiques conduites sur le territoire et les orientations envisagées.

Cette obligation introduite en première lecture par l’Assemblée nationale a été confirmée par le Sénat. Initialement cette disposition devait concerner les communes et les EPCI de plus de 10 000 habitants. Toutefois, en seconde lecture, le Sénat a rehaussé ce seuil à 50 000 habitants. Il a suivi l’argumentaire de la Commission des lois du Sénat motivé par un souci de cohérence et de pragmatisme : cohérence pour être en phase avec les dispositions imposées en matière de développement durable ; pragmatisme pour s’assurer que les collectivités concernées peuvent mettre en œuvre cette obligation. Malgré tout, si le texte est adopté en l’état, seulement 9% des EPCI au lieu des 44% initialement prévus[1] seront concernées.

Certes, le diagnostic n’est pas suffisant pour engager les collectivités à agir. Il constitue tout de même un levier de taille pour les élu-e-s et les agent-e-s afin d’irriguer l’action publique d’une culture de l’égalité femmes-hommes. Le guide construit conjointement par le Centre Hubertine Auclert et Perfégal le souligne.

La commande publique devrait désormais être exemplaire

Le projet de loi dans son article 3 renforce aussi les marges de manœuvre des collectivités pour inciter les entreprises à être vertueuses en matière d’égalité professionnelle. Ainsi, si le projet de loi est voté, il devrait permettre de rendre la commande publique exemplaire.

Les entreprises qui tenteront de décrocher un marché public ou un contrat de partenariat devront respecter la législation en vigueur sur l’égalité femmes-hommes. Celles ayant été condamnées pour faits de discriminations ou non-respect des règles relatives à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et celles n’ayant pas engagé de négociation annuelle sur les objectifs d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes seront ipso facto écartées.

En revanche, l’interdiction de soumissionner fondée sur la violation de l’obligation annuelle de négociation sur les salaires effectifs introduite par le Sénat en première lecture a finalement été écartée par la Commission des lois de l’Assemblée nationale.

Une loi qui étendrait les obligations en termes de parité

Deux types de démarches ont été objet de débats quant à la marche à suivre pour atteindre la parité. Si l’Assemblée nationale a privilégié une démarche ambitieuse et volontariste, le Sénat lui a préféré à une démarche plus progressive. Dans l’état actuel des débats, la progressivité semble prendre le pas sur le volontarisme, mais il faudra attendre le vote de l’Assemblée nationale pour avoir confirmation de cette avancée plus mesurée vers la parité.

Des avancées timides pour atteindre la parité des instances politiques

Ainsi le projet de loi entend doubler les pénalités financières pour les partis politiques ne respectant pas la parité aux élections législatives (Article 18 II).

En première lecture, l’Assemblée nationale avait introduit à travers l’article 18 bis des dispositions visant à assurer la stricte parité dans les exécutifs des collectivités locales. Les listes de candidats aux fonctions exécutives locales devaient placer un candidat de sexe différent à celui du/de la chef/cheffe de l’exécutif. Pour éviter un risque d’inconstitutionnalité, l’élection de la liste et l’élection de l’exécutif étant deux élections distinctes, le Sénat a supprimé cette disposition.

La parité confirmée dans les conseils des établissements publics d’Etat et des entreprises publiques

L’article 18 quinquies prévoyait d’instaurer la parité dans les conseils d’administration des établissements publics locaux. Le Sénat, au motif notamment que certains de ces établissements peuvent être localisées dans des communes où la parité ne s’applique pas (- 1000 habitants), a supprimé cet article.

En revanche, dans les établissements publics d’Etat, le Sénat confirme l’introduction de l’article 19 ter qui modifie la loi du 12 mars 2012 pour atteindre dès le deuxième renouvellement des conseils d’administration (CA) et de surveillance (CS) la stricte parité.

Dans le même sens, l’obligation de parité dans les CA et les CS des entreprises publiques a été confirmée par le Sénat, contre avis de sa commission des lois (article 20).

L’article 23 bis A prévoit l’instauration de la parité dans les conseils et conseils d’Administrations des caisses nationales de sécurité sociale. Le projet de loi entend enfin féminiser les instances publiques (chambres consulaires –art 21, chambres d’agriculture –art 22, établissements culturels –art 22 ter A, chambres des métiers –art 22 ter.)

Pour aller plus loin

le dossier sur le site de l’Assemblée nationale 

le guide « pour convaincre du bien-fondé des politiques locales d’égalité femmes-hommes » du Centre Hubertine Auclert 

[1] DGCL, Les collectivités locales en chiffres, 2011

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